Plus de 40 % des médecins inscrits à l’examen obligatoire de l’Office québécois de la langue française l’ont coulé l’an dernier, soit plus que la moyenne provinciale.
Seulement 58 % des candidats ont réussi l’examen de français l’an dernier, soit 53 médecins sur 91. C’est en dessous de la moyenne de 63 % tous ordres professionnels confondus.
Seule une minorité de médecins doivent réussir cet examen pour devenir membre du Collège des médecins du Québec (CMQ), car les compétences linguistiques sont immédiatement reconnues s’ils possèdent :
- A étudié au moins trois ans en français au secondaire ou lors d’études postsecondaires (quel que soit le pays);
- Avoir réussi l’examen de français langue maternelle en 4e ou 5e secondaire;
- Obtention d’un certificat d’études secondaires au Québec après 1985-1986 (même s’il s’agit d’une école de langue anglaise).
Beaucoup d’exemptions
Ainsi, les médecins étrangers qui ont étudié en français dans un autre pays ou les Québécois qui ont fait leurs études secondaires ici, en anglais, sont exemptés, par exemple.
Par courriel, l’OQLF précise également que « ce sont les ordres professionnels qui déterminent si leurs candidats doivent passer l’examen ».
L’OQLF a refusé de transmettre une copie de son examen au Enregistrer. Cependant, le site précise qu’il se déroule en quatre parties : lecture, discussion de groupe, rédaction d’un texte de 150 mots et rencontre avec la personne en charge de l’examen.
Se répète à l’infini
Ceux qui échouent à l’examen peuvent le repasser « autant de fois que nécessaire », souligne l’OQLF, qui précise que 77 % des attestations délivrées l’ont été après une première tentative.
Le permis temporaire des travailleurs qui doivent réussir l’examen peut être renouvelé trois fois, pour une période maximale de quatre ans.
Actuellement, seuls 62 médecins détiennent un permis temporaire sur 23 000 membres du Collège. Ils représentent donc une minorité de médecins en attente de réussite à l’examen et n’expliquent pas à eux seuls la prévalence de l’anglais dans plusieurs hôpitaux.
Par ailleurs, le CMQ répond que la connaissance de la langue des étudiants en médecine est contrôlée par les universités, qui doivent exiger une maîtrise du français avant de pouvoir intégrer un milieu clinique.
Par courriel, l’Université McGill indique que ses cohortes montréalaises doivent atteindre un niveau intermédiaire de français et que 95 % de ses étudiants en médecine sont des résidents du Québec.
Pourquoi tant de patients ont-ils été levés au Enregistrer qu’ils s’étaient heurtés à des résidents non francophones de McGill? L’Université a refusé notre demande d’entrevue à ce sujet.
Réussir un examen est « insuffisant »
Photo de courtoisie
Maxime Laporte
Réussir un examen demeure insuffisant pour assurer des soins de santé en français au Québec, dénoncent des organismes.
« Il ne suffit pas de passer un test, il faut imposer le français institutionnellement […]. Pour faire vivre une langue dans la réalité concrète, il ne suffit pas de la connaître ou de pouvoir la parler théoriquement, il faut que ce soit la langue normale de travail », plaide le président du Mouvement Québec français, Maxime Laporte.
Ainsi, les examens de l’Office québécois de langue française pour l’obtention d’un permis d’exercice ou les exigences minimales imposées par l’Université McGill pour un diplôme ne donnent rien si les professionnels n’exercent pas par la suite, croit-il.
Selon M. Laporte, le bilinguisme d’établissements comme le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) ou le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l’Ouest-de-l’Île de Montréal ne va pas jusqu’à l’anglicisation.
Angliciser le français
« Ça anglicise les allophones et les francophones, déplore-t-il. Même si ce sont nos propres impôts qui financent ces institutions.
« Il faut vraiment renforcer la francisation en milieu de travail », a ajouté Marie Anne Alepin, de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal.
Le président d’Impératif français, Jean-Paul Perreault, insiste pour que les patients n’aient pas à demander à être traités en français. Cette responsabilité incombe aux professionnels et à leurs employeurs.
« Le patient a besoin du service ; ce qui lui importe, c’est de l’obtenir », insiste-t-il, précisant que les patients se présentent déjà à l’hôpital dans un état de vulnérabilité. Néanmoins, s’occuper d’une langue que l’on ne maîtrise pas, cela devient un enjeu de sécurité, selon lui.
« Pourquoi les ordres professionnels ne s’expriment-ils pas davantage auprès de leurs membres ? demande-t-il, pour que le français soit la langue de travail.
« Leur raison d’être est de protéger le public », poursuit à son tour M. Laporte.
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Source : www.journaldemontreal.com